Le développement passe par la route entend-on très souvent. En 2016, le Burkina Faso comptait 3522 km de route nationale et 1885 km de routes nationales en terre moderne. En mai 2020, le Premier ministre affirmait qu’entre 2016 et 2019, l’Etat a bitumé 771 km de routes. 960 autres km étaient en travaux sur l’étendue du territoire national. Durant la même période, sur 2323 km de pistes rurales, dont les travaux ont été engagés, 1928 km sont achevés. Pour 2020, l’objectif est de réaliser 614 km. En 2016, la Boucle du Mouhoun (dans l’Ouest du Burkina Faso) comptait 360km de routes bitumées. Et c’est justement là que nous allons.
Ouaga-Dédougou (323 km pour 3h50), Dédougou-Tiériba (42 km pour 45mn), Tiériba-Solenzo (134,8 km, pour 2h50), Solenzo-Balavé (25km). L’itinéraire semble simple et de tout repos. De Ouaga à Dédougou oui. Le reste c’est la croix et la bannière.
Les 42km qui relient Dédougou à Tiériba sont réputés pour être impraticables en saison hivernale. Nous sommes en janvier 2021 et même en l’absence de boue et d’eau, il faut en gros 1h30mn pour les avaler, même en véhicule 4×4. La souffrance est à son comble lorsque l’on tente de rallier Balavé à partir de Solenzo. 25 KM de piste, non de montagnes russes. Tant la route est dégradée par les eaux de pluies, mais surtout par les gros porteurs dont ceux de la Sofitex qui l’empruntent régulièrement pour sortir les récoltes de coton des champs de la zone (la région de l’Ouest est la plus grande zone cotonnière du pays). Il faudra 1 heure et poussière pour atteindre la commune.

Cette situation rend difficile la mobilité commerciale et les évacuations sanitaires des habitants de la zone qui se sentent quelques peu coupés du reste du Burkina. Ces derniers préfèrent s’approvisionner en marchandises et divers au Mali voisin, plutôt que de prendre les pistes qui mènent au chef-lieu de la province. C’est plus dangereux, plus long et moins rentable, racontent certaines âmes. La Boucle du Mouhoun en effet, est aussi touchée par l’insécurité et le terrorisme.
Certaines âmes de cette contrée reculée ont par ailleurs confié n’avoir pas reçu la visite des candidats aux élections pendant la campagne présidentielle. Pourtant, le gouvernement avait promis et même lancé les travaux de bitumage d’une partie de l’itinéraire que nous avons emprunté, celui de Dédougou à Tiériba. Une partie de la route à la sortie de Dédougou a été raclée depuis 2019, sans suite.
Cette situation suscite de nombreuses questions, mais révèlent surtout de nombreuses inégalités en termes d’infrastructures routières. Selon l’INSD, la région de la Boucle du Mouhoun en 2016, était parmi les dernières (9e sur 13 régions avec 364 km de routes praticables) innervées en routes alors que celles du Centre (en termes de superficie) sont les plus fournies. Et les questions principales, qui taraudent l’esprit, sont : pourquoi une région à fort potentiel économique est-elle si délaissée ? Et que fait la Sofitex pour entretenir ces routes, elle qui l’exploite à fond dans le secteur de l’or blanc ?
JM